Lauda Sion
Sion, célèbre ton Sauveur,
chante ton chef et ton pasteur
par des hymnes et des chants.
chante ton chef et ton pasteur
par des hymnes et des chants.
Tant que tu peux, tu dois
oser
car Il dépasse tes louanges ;
tu ne peux trop Le louer.
car Il dépasse tes louanges ;
tu ne peux trop Le louer.
Le pain vivant, le pain de
vie,
Il est aujourd’hui proposé
comme objet de tes louanges.
Il est aujourd’hui proposé
comme objet de tes louanges.
Au repas sacré de la Cène
il est bien vrai qu’Il fut donné
au groupe des douze frères.
il est bien vrai qu’Il fut donné
au groupe des douze frères.
Louons-Le à voix pleine et
forte,
que soit joyeuse et rayonnante
l’allégresse de nos cœurs !…
que soit joyeuse et rayonnante
l’allégresse de nos cœurs !…
À ce banquet du nouveau
Roi,
la Pâque de la Loi nouvelle
met fin à la Pâque ancienne.
la Pâque de la Loi nouvelle
met fin à la Pâque ancienne.
L’ordre ancien le cède au
nouveau,
la réalité chasse l’ombre
et la lumière, la nuit.
la réalité chasse l’ombre
et la lumière, la nuit.
Ce que le Christ fit à la
Cène,
Il ordonna de le faire
en mémoire de Lui.
Il ordonna de le faire
en mémoire de Lui.
Instruits par Son précepte
saint,
nous consacrons le pain, le vin,
en victime de salut…
nous consacrons le pain, le vin,
en victime de salut…
Sa chair est une
nourriture,
Son sang est une boisson 1,
mais le Christ tout entier demeure
sous chacune des espèces.
Son sang est une boisson 1,
mais le Christ tout entier demeure
sous chacune des espèces.
On Le reçoit sans le
briser,
le rompre ni le diviser ;
Il est reçu tout entier.
le rompre ni le diviser ;
Il est reçu tout entier.
Qu’un seul ou mille
communient,
ceux-ci reçoivent autant que celui-là,
on S’en nourrit sans Le détruire…
ceux-ci reçoivent autant que celui-là,
on S’en nourrit sans Le détruire…
Voici le pain des anges 2,
devenu la nourriture des pèlerins ;
c’est le vrai pain des enfants
qu’il ne faut pas jeter aux chiens 3.
devenu la nourriture des pèlerins ;
c’est le vrai pain des enfants
qu’il ne faut pas jeter aux chiens 3.
D’avance il fut annoncé
par Isaac en sacrifice 4,
par l’agneau pascal immolé
par la manne donnée à nos pères.
par Isaac en sacrifice 4,
par l’agneau pascal immolé
par la manne donnée à nos pères.
Ô bon Pasteur, pain
véritable,
ô Jésus, aie pitié de nous,
nourris-nous et protège-nous,
fais-nous voir les biens éternels
dans la terre des vivants 5.
ô Jésus, aie pitié de nous,
nourris-nous et protège-nous,
fais-nous voir les biens éternels
dans la terre des vivants 5.
Toi qui sais tout et qui
peux tout
Tu nous nourris en cette vie,
fais de nous, là-haut, tes convives,
cohéritiers et compagnons
des saints dans la cité céleste.
Tu nous nourris en cette vie,
fais de nous, là-haut, tes convives,
cohéritiers et compagnons
des saints dans la cité céleste.
Mystère de la foi
« La nuit même où il
était livré, le Seigneur Jésus » (1 Co 11, 23) institua le Sacrifice
eucharistique de son Corps et de son Sang. Les paroles de l'Apôtre Paul nous
ramènent aux circonstances dramatiques dans lesquelles est née l'Eucharistie,
qui est marquée de manière indélébile par l'événement de la passion et de la
mort du Seigneur. Elle n'en constitue pas seulement l'évocation, mais encore la
re-présentation sacramentelle. C'est le sacrifice de la Croix qui se perpétue
au long des siècles 6. On trouve une bonne expression de cette
vérité dans les paroles par lesquelles, dans le rite latin, le peuple répond à
la proclamation du « mystère de la foi » faite par le prêtre : « Nous
proclamons ta mort, Seigneur Jésus ».
L'Église a reçu
l'Eucharistie du Christ son Seigneur non comme un don, pour précieux qu'il soit
parmi bien d'autres, mais comme le don par excellence, car il est le don de
Lui-même, de Sa personne dans sa sainte humanité, et de son œuvre de salut.
Celle-ci ne reste pas enfermée dans le passé, puisque « tout ce que le
Christ est, et tout ce qu'il a fait et souffert pour tous les hommes, participe
de l'éternité divine et surplombe ainsi tous les temps... »7.
Quand l'Église célèbre
l'Eucharistie, mémorial de la mort et de la résurrection de son Seigneur, cet
événement central du salut est rendu réellement présent et ainsi « s'opère
l'œuvre de notre rédemption »8. Ce sacrifice est tellement
décisif pour le salut du genre humain que Jésus Christ ne l'a accompli et n'est
retourné vers le Père qu'après nous avoir laissé le moyen d'y participer comme
si nous y avions été présents. Tout fidèle peut ainsi y prendre part et en
goûter les fruits d'une manière inépuisable. Telle est la foi dont les
générations chrétiennes ont vécu au long des siècles. Cette foi, le Magistère
de l'Église l'a continuellement rappelée avec une joyeuse gratitude pour ce don
inestimable 9. Je désire encore une fois redire cette vérité, en me
mettant avec vous, chers frères et sœurs, en adoration devant ce Mystère :
Mystère immense, Mystère de miséricorde. Qu'est-ce que Jésus pouvait faire de
plus pour nous ? Dans l'Eucharistie, il nous montre vraiment un amour qui
va « jusqu'au bout » (cf. Jn 13, 1), un amour qui ne connaît pas de
mesure.
Cet aspect de charité
universelle du Sacrement eucharistique est fondé sur les paroles mêmes du
Sauveur. En l'instituant, Jésus ne se contenta pas de dire Ceci est mon corps, Ceci est
mon sang, mais il ajouta livré pour
vous et répandu pour la multitude
(Lc 22, 19-20). Il n'affirma pas seulement que ce qu'il leur donnait à manger
et à boire était son corps et son sang, mais il en exprima aussi la valeur
sacrificielle, rendant présent de manière sacramentelle son sacrifice qui
s'accomplirait sur la Croix quelques heures plus tard pour le salut de tous. « La
Messe est à la fois et inséparablement le mémorial sacrificiel dans lequel se
perpétue le sacrifice de la Croix, et le banquet sacré de la communion au Corps
et au Sang du Seigneur »10.
L'Église vit
continuellement du sacrifice rédempteur, et elle y accède non seulement par un
simple souvenir plein de foi, mais aussi par un contact actuel, car ce
sacrifice se rend présent, se perpétuant sacramentellement, dans chaque
communauté qui l'offre par les mains du ministre consacré. De cette façon,
l'Eucharistie étend aux hommes d'aujourd'hui la réconciliation obtenue une fois
pour toutes par le Christ pour l'humanité de tous les temps. En effet, « le
sacrifice du Christ et le sacrifice de l'Eucharistie sont un unique sacrifice »11.
Saint Jean Chrysostome le disait déjà clairement : « Nous offrons
toujours le même Agneau, non pas l'un aujourd'hui et un autre demain, mais
toujours le même. Pour cette raison, il n'y a toujours qu'un seul sacrifice. [...]
Maintenant encore, nous offrons la victime qui fut alors offerte et qui ne se
consumera jamais »12.
La Messe rend présent le
sacrifice de la Croix, elle ne s'y ajoute pas et elle ne le multiplie pas 13.
Ce qui se répète, c'est la célébration en mémorial, la manifestation en mémorial (memorialis
demonstratio) 14 du sacrifice, par laquelle le sacrifice rédempteur
du Christ, unique et définitif, se rend présent dans le temps. La nature
sacrificielle du Mystère eucharistique ne peut donc se comprendre comme quelque
chose qui subsiste en soi, indépendamment de la Croix, ou en référence
seulement indirecte au sacrifice du Calvaire.
En vertu de son rapport
étroit avec le sacrifice du Golgotha, l'Eucharistie est un sacrifice au sens
propre, et non seulement au sens générique, comme s'il s'agissait d'une simple
offrande que le Christ fait de lui-même en nourriture spirituelle pour les
fidèles. En effet, le don de son amour et de son obéissance jusqu'au terme de
sa vie (cf. Jn 10, 17-18) est en premier lieu un don à son Père. C'est
assurément un don en notre faveur, et même en faveur de toute l'humanité (cf.
Mt 26, 28 ; Mc 14, 24 ; Lc 22, 20 ; Jn 10, 15), mais c'est avant
tout un don au Père : « Sacrifice que le Père a accepté, échangeant
le don total de son Fils, qui s'est fait “obéissant jusqu'à la mort” (Ph 2, 8),
avec son propre don paternel, c'est-à-dire avec le don de la vie nouvelle et
immortelle dans la résurrection »15.
En donnant son sacrifice à
l'Église, le Christ a voulu également faire sien le sacrifice spirituel de
l'Église, appelée à s'offrir aussi elle-même en même temps que le sacrifice du
Christ. Tel est l'enseignement du Concile Vatican II concernant tous les
fidèles : « Participant au Sacrifice eucharistique, source et sommet
de toute la vie chrétienne, ils offrent à Dieu la victime divine, et s'offrent
eux-mêmes avec elle »16.
La Pâque du Christ comprend
aussi, avec sa passion et sa mort, sa résurrection, comme le rappelle
l'acclamation du peuple après la consécration : « Nous célébrons ta
résurrection ». En effet, le Sacrifice eucharistique rend présent non
seulement le mystère de la passion et de la mort du Sauveur, mais aussi le
mystère de la résurrection, dans lequel le sacrifice trouve son couronnement.
C'est en tant que vivant et ressuscité que le Christ peut, dans l'Eucharistie,
se faire pain de la vie (Jn 6, 35.
48), pain vivant (Jn 6, 51). Saint
Ambroise le rappelait aux néophytes, en appliquant à leur vie l'événement de la
résurrection : « Si le Christ est à toi aujourd'hui, il ressuscite
pour toi chaque jour »17. Saint Cyrille d’Alexandrie, quant à
lui, ne soulignait que la participation aux saints Mystères « est vraiment
une confession et un rappel que le Seigneur est mort et qu'il est revenu à la
vie pour nous et en notre faveur »18.
Dans la Messe, la
représentation sacramentelle du sacrifice du Christ couronné par sa
résurrection implique une présence tout à fait spéciale que – pour reprendre
les mots de Paul VI – « on nomme “réelle”, non à titre exclusif, comme si
les autres présences n'étaient pas “réelles”, mais par antonomase parce qu'elle
est substantielle, et que par elle le Christ, Homme-Dieu, se rend présent tout
entier »19. Ainsi est proposée de nouveau la doctrine toujours
valable du Concile de Trente : « Par la consécration du pain et du
vin s'opère le changement de toute la substance du pain en la substance du
corps du Christ notre Seigneur et de toute la substance du vin en la substance
de son sang ; ce changement, l'Église catholique l'a justement et
exactement appelé transsubstantiation »20. L'Eucharistie est
vraiment mysterium fidei, mystère qui
dépasse notre intelligence et qui ne peut être accueilli que dans la foi, comme
l'ont souvent rappelé les catéchèses patristiques sur ce divin Sacrement. « Ne
t'attache donc pas – exhorte saint Cyrille de Jérusalem – comme à des éléments
naturels au pain et au vin, car ils sont, selon la déclaration du Maître, corps
et sang. C'est, il est vrai, ce que te suggèrent les sens ; mais que la
foi te rassure »21.
Nous continuerons à chanter
avec le Docteur angélique : Adoro te
devote, latens Deitas. Devant ce mystère d'amour, la raison humaine fait
l'expérience de toute sa finitude. On voit alors pourquoi, au long des siècles,
cette vérité a conduit la théologie à faire de sérieux efforts de
compréhension.
Ce sont des efforts
louables, d'autant plus utiles et pénétrants qu'ils ont permis de conjuguer
l'exercice critique de la pensée avec la foi
vécue de l'Église, recueillie spécialement dans le charisme certain de vérité du Magistère et dans l'intelligence intérieure des réalités
spirituelles à laquelle parviennent surtout les saints 22. Il y
a tout de même la limite indiquée par Paul VI : « Toute explication
théologique, cherchant quelque intelligence de ce mystère, doit, pour être en
accord avec la foi catholique, maintenir que, dans la réalité elle-même,
indépendante de notre esprit, le pain et le vin ont cessé d'exister après la
consécration, en sorte que c'est le corps et le sang adorables du Seigneur
Jésus qui, dès lors, sont réellement présents devant nous sous les espèces
sacramentelles du pain et du vin »23.
L'efficacité salvifique du
sacrifice se réalise en plénitude dans la communion, quand nous recevons le
corps et le sang du Seigneur. Le Sacrifice eucharistique tend en soi à notre
union intime, à nous fidèles, avec le Christ à travers la communion : nous
le recevons lui-même, Lui qui s'est offert pour nous, nous recevons son corps,
qu'il a livré pour nous sur la Croix, son sang, qu'il a « répandu pour la
multitude, en rémission des péchés » (Mt 26, 28). Rappelons-nous ses
paroles : « De même que le Père, qui est vivant, m'a envoyé, et que
moi je vis par le Père, de même aussi celui qui me mangera vivra par moi »
(Jn 6, 57). C'est Jésus lui-même qui nous rassure : une telle union, qu'il
compare par analogie à celle de la vie trinitaire, se réalise vraiment.
L'Eucharistie est un vrai banquet, dans lequel le Christ s'offre en nourriture.
Quand Jésus parle pour la première fois de cette nourriture, ses auditeurs
restent stupéfaits et désorientés, obligeant le Maître à souligner la vérité
objective de ses paroles : « Amen, amen, je vous le dis : si
vous ne mangez pas la chair du Fils de l'homme, et si vous ne buvez pas son
sang, vous n'aurez pas la vie en vous » (Jn 6, 53). Il ne s'agit pas d'un
aliment au sens métaphorique : « Ma chair est la vraie nourriture, et
mon sang est la vraie boisson » (Jn 6, 55).
À travers la communion à
son corps et à son sang, le Christ nous communique aussi son Esprit. Saint
Éphrem écrit : « Il appela le pain son corps vivant, il le remplit de
lui-même et de son Esprit. [...] Et celui qui le mange avec foi mange le Feu et
l'Esprit [...]. Prenez-en, mangez-en tous, et mangez avec lui l'Esprit Saint.
C'est vraiment mon corps et celui qui le mange vivra éternellement »24.
Dans l'épiclèse eucharistique, l'Église demande ce Don divin, source de tout
autre don. On lit, par exemple, dans la Divine Liturgie de saint Jean
Chrysostome : « Nous t'invoquons, nous te prions et nous te supplions :
envoie ton Esprit Saint sur nous tous et sur ces dons, [...] afin que ceux qui
y prennent part obtiennent la purification de l'âme, la rémission des péchés et
le don du Saint Esprit »25. Et dans le Missel romain le célébrant
demande : « Quand nous serons nourris de son corps et de son sang et
remplis de l'Esprit Saint, accorde-nous d'être un seul corps et un seul esprit
dans le Christ »26. Ainsi, par le don de son corps et de son
sang, le Christ fait grandir en nous le don de son Esprit, déjà reçu au Baptême
et offert comme « sceau » dans le sacrement de la Confirmation.
L'acclamation que le peuple
prononce après la consécration se conclut de manière heureuse en exprimant la
dimension eschatologique qui marque la Célébration eucharistique (cf. 1 Co 11,
26) : « ... Nous attendons ta venue dans la gloire ».
L'Eucharistie est tension vers le terme, avant- goût de la plénitude de joie
promise par le Christ (cf. Jn 15, 11) ; elle est en un sens l'anticipation
du Paradis, gage de la gloire future 27.
Dans l'Eucharistie, tout exprime cette attente confiante : « Nous
espérons le bonheur que tu promets et l'avènement de Jésus Christ, notre
Sauveur »28. Celui qui se nourrit du Christ dans l'Eucharistie
n'a pas besoin d'attendre l'au-delà pour recevoir la vie éternelle : il la
possède déjà sur terre, comme prémices de la plénitude à venir, qui concernera
l'homme dans sa totalité. Dans l'Eucharistie en effet, nous recevons également
la garantie de la résurrection des corps à la fin des temps : « Celui
qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le
ressusciterai au dernier jour » (Jn 6, 54). Cette garantie de la
résurrection à venir vient du fait que la chair du Fils de l'homme, donnée en
nourriture, est son corps dans son état glorieux de Ressuscité. Avec
l'Eucharistie, on assimile pour ainsi dire le secret de la résurrection. C'est pourquoi saint Ignace d'Antioche
définit avec justesse le Pain eucharistique comme « remède d'immortalité,
antidote pour ne pas mourir »29.
La tension eschatologique
suscitée dans l'Eucharistie exprime et affermit la communion avec l'Église du
ciel. Ce n'est pas par hasard que, dans les anaphores orientales ou dans les
prières eucharistiques latines, on fait mémoire avec vénération de Marie,
toujours vierge, Mère de notre Dieu et Seigneur Jésus Christ, des anges, des
saints Apôtres, des glorieux martyrs et de tous les saints. C'est un aspect de
l'Eucharistie qui mérite d'être souligné : en célébrant le sacrifice de
l'Agneau, nous nous unissons à la liturgie céleste, nous associant à la
multitude immense qui s'écrie : « Le salut est donné par notre Dieu,
lui qui siège sur le Trône, et par l'Agneau ! » (Ap 7, 10). L'Eucharistie est vraiment un coin du ciel
qui s'ouvre sur la terre ! C'est un rayon de la gloire de la Jérusalem
céleste, qui traverse les nuages de notre histoire et qui illumine notre
chemin.
Une autre conséquence
significative de cette tension eschatologique inhérente à l'Eucharistie
provient du fait qu'elle donne une impulsion à notre marche dans l'histoire,
faisant naître un germe de vive espérance dans le dévouement quotidien de
chacun à ses propres tâches. En effet, si la vision chrétienne porte à regarder
vers les cieux nouveaux et la terre nouvelle (cf. Ap 21, 1), cela
n'affaiblit pas, mais stimule notre sens de la responsabilité envers notre
terre 30. Je désire le redire avec force au début du nouveau
millénaire, pour que les chrétiens se sentent plus que jamais engagés à ne pas
faillir aux devoirs de leur citoyenneté terrestre. Il est de leur devoir de
contribuer, à la lumière de l'Évangile, à construire un monde qui soit à la
mesure de l'homme et qui réponde pleinement au dessein de Dieu.
Les problèmes qui
assombrissent notre horizon actuel sont nombreux. Il suffit de penser à
l'urgence de travailler pour la paix, de poser dans les relations entre les
peuples des jalons solides en matière de justice et de solidarité, de défendre
la vie humaine, de sa conception jusqu'à sa fin naturelle. Et que dire des
mille contradictions d'un univers mondialisé
où les plus faibles, les plus petits et les plus pauvres semblent avoir bien
peu à espérer ? C'est dans ce monde que doit jaillir de nouveau
l'espérance chrétienne ! C'est aussi pour cela que le Seigneur a voulu
demeurer avec nous dans l'Eucharistie, en inscrivant dans la présence de son
sacrifice et de son repas la promesse d'une humanité renouvelée par son amour.
De manière significative, là où les Évangiles synoptiques racontent
l'institution de l'Eucharistie, l'Évangile de Jean propose, en en illustrant
ainsi le sens profond, le récit du lavement
des pieds, par lequel Jésus se fait maître de la communion et du service
(cf. Jn 13, 1-20). De son côté, l'Apôtre Paul déclare indigne d'une communauté chrétienne la participation à la Cène du
Seigneur dans un contexte de divisions et d'indifférence envers les pauvres
(cf. 1 Co 11, 17-22. 27-34)31.
Proclamer la mort du
Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne (1
Co 11, 26) implique, pour ceux qui participent à l'Eucharistie, l'engagement de
transformer la vie, pour qu'elle devienne, d'une certaine façon, totalement eucharistique. Ce sont
précisément ce fruit de transfiguration de l'existence et l'engagement à
transformer le monde selon l'Évangile qui font resplendir la dimension
eschatologique de la Célébration eucharistique et de toute la vie chrétienne :
« Viens, Seigneur Jésus ! » (Ap 22, 20).
Jean-Paul II, in Ecclesia de
Eucharistia
1. Jn 6,55
2. Ps 78,25
3. Mt 15,26
4. Gn 22
5. Ps 26,13
6. Cf. Concile œcuménique Vat.
II, Constitution sur la sainte Liturgie Sacrosanctum
concilium, n°47: Salvator noster [...] Sacrificium Eucharisticum Corporis
et Sanguinis sui instituit, quo Sacrificium Crucis in sæcula, donec veniret,
perpetuaret...: « Notre Sauveur [...] institua le sacrifice eucharistique de
son Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des
siècles, jusqu'à ce qu'il vienne ».
7. Catéchisme de l'Église
catholique, n°1085.
8. Concile œcuménique Vat.
II, Constitution dogmatique Lumen gentium,
n°3.
9. Cf. Paul VI, Profession
de foi (30 juin 1968), n°24: AAS 60 (1968), p. 442; La Documentation catholique
65 (1968), col. 1256-1257; Jean-Paul II, Lettre apostolique Dominicæ Cenæ (24 février 1980), n°9:
AAS 72 (1980), pp. 142-146; La Documentation catholique 77 (1980), pp. 305-306.
10. Catéchisme de l'Église
catholique, n°1382.
11. Ibid., n°1367.
12. Homélie sur la Lettre
aux Hébreux, 17, 3: PG 63, 131.
13. Cf. Concile œcuménique de
Trente, Session XXII, Doctrine sur le saint sacrifice de la Messe, ch. 2: DS
1743; La Foi catholique, n°768: « C'est une seule et même victime, c'est le
même qui offre maintenant par le ministère des prêtres, qui s'est offert
lui-même alors sur la Croix; seule, la manière d'offrir diffère ».
14. Pie XII, Encyclique Mediator Dei (20 novembre 1947): AAS 39
(1947), p. 548; La Documentation catholique 45 (1948), col. 216.
15. Jean-Paul II, Encyclique
Redemptor hominis (15 mars 1979), n°20:
AAS 71 (1979), p. 310; La Documentation catholique 76 (1979), p. 317.
16. Constitution dogmatique
Lumen gentium, n°11.
17. De sacramentis, V, 4, 26: CSEL 73, 70; SCh 25bis, p. 135.
18. In Ioannis Evangelium,
XII, 20: PG 74, 726.
19. Encyclique Mysterium fidei (3 septembre 1965): AAS
57 (1965), p. 764; La Documentation catholique 62 (1965), col. 1643.
20. Session XIII, Décret
sur la très sainte Eucharistie, ch. 4: DS, 1462; La Foi catholique, n°739.
21. Catéchèses
mystagogiques, IV, 6: SCh 126, p. 138.
22. Concile œcuménique Vat.
II, Constitution dogmatique sur la Révélation divine Dei Verbum, n°8.
23. Profession de foi (30
juin 1968), n°25: AAS 60 (1968), pp. 442-443; La Documentation catholique 65
(1968), col. 1256.
24. Homélie IV pour la
Semaine sainte: CSCO 413 / Syr. 182, 55.
25. Anaphore.
26. Prière eucharistique
III.
27. Solennité du Corps et
du Sang du Christ, IIe Vêpres, antienne du Magnificat.
28. Missel romain,
Embolisme après le Notre Père.
29. Lettre aux Éphésiens,
20: PG 5, 661: SCh 10 bis, p. 77.
30. Cf. Concile œcuménique Vat.
II, Constitution pastorale sur l'Église dans le monde de ce temps Gaudium et spes, n°39.
31. « Tu veux honorer le
corps du Christ? Ne le méprise pas lorsqu'il est nu. Ne l'honore pas ici, dans
l'église, par des tissus de soie tandis que tu le laisses dehors souffrir du
froid et du manque de vêtements. Car celui qui a dit: Ceci est mon corps, et
qui l'a réalisé en le disant, c'est lui qui a dit: Vous m'avez vu avoir faim,
et vous ne m'avez pas donné à manger, et aussi: Chaque fois que vous ne l'avez
pas fait à l'un de ces petits, c'est à moi que vous ne l'avez pas fait [...].
Quel avantage y a- t-il à ce que la table du Christ soit chargée de vases d'or,
tandis que lui-même meurt de faim? Commence par rassasier l'affamé, et avec ce
qui te restera tu orneras son autel »: S. Jean Chrysostome, Homélie sur l'Évangile
de Matthieu 50, 3-4: PG 58, 508-509; cf. Jean-Paul II, Encyclique Sollicitudo rei socialis (30 décembre
1987), n°31: AAS 80 (1988), pp. 553-556; La Documentation catholique 85 (1988),
p. 246.