Chers fidèles diocésains de la Martinique,
Chers sœurs et frères,
La Martinique a peur, elle a besoin d’être délivrée de tout mal, elle attend que Dieu donne la Paix à notre temps, elle aspire à être libérée du péché et rassurée devant les épreuves qui l’accablent. Elle attend le bonheur et l’espérance, l’avènement de Notre Seigneur Jésus-Christ : c’est urgent ! Cette certitude est plus que jamais inscrite en mon âme. Je le sais, je l’ai vu dans les cœurs, entendu sur les lèvres, après avoir fait le tour des communautés et des réalités pastorales et sociales de notre île. Pendant plusieurs mois, le peuple de Dieu a vécu une série de mini-synodes dans les paroisses et les entités pastorales pour accueillir l’évêque et lui présenter sa vie dans le monde et dans l’Esprit-Saint. Oui, l’Église est en marche, et le monde attend son passage. Il y a en Martinique une grande attente vis-à-vis de l’Église Catholique.
Certes, le pape François a affirmé le mois dernier que nous étions entrés dans la troisième guerre mondiale et, en effet, nous sommes dans une lutte sans merci avec l’esprit du monde prêt à dévorer les fils et les filles de Dieu, les familles, les paroisses, les mouvements et les prêtres. Mais votre pasteur ne peut ignorer qu’il a vu un peuple debout, un peuple vaillant, capable non seulement de résister mais, plus encore, de remporter de grandes victoires sur le mystère d’iniquité qui croît mystérieusement en ce monde.
Notre communauté diocésaine a donc les moyens d’engager enfin ce « renouveau ecclésial qu’on ne peut différer », auquel le pape François nous invite :
J’imagine, dit-il, un choix
missionnaire capable de transformer toute chose, afin
que les habitudes, les styles, les horaires, le langage et toute structure
ecclésiale deviennent un canal adéquat pour l’évangélisation du monde actuel,
plus que pour l’auto-préservation. La réforme des structures, qui exige la
conversion pastorale, ne peut se comprendre qu’en ce sens : faire en sorte
qu’elles deviennent toutes plus missionnaires, que la pastorale ordinaire en
toutes ses instances soit plus expansive et ouverte, qu’elle mette les agents
pastoraux en constante attitude de “sortie” et favorise ainsi la réponse
positive de tous ceux auxquels Jésus offre son amitié (Evangelii Gaudium n°27).
C’est
pourquoi, plein d’Espérance, j’ai décidé de vous proposer de prolonger la
première année de démarche synodale par un plan pastoral en vue d’une
conversion missionnaire de toute la vie de l’Église : ECCLESIA’M 2020 !
Le mot d’ordre…
La
Sainte Écriture affirme que « l’Esprit et l’Épouse disent :
"Viens ! Viens, Seigneur Jésus" » (Apocalypse 22,17).
L’Esprit, c’est l’Esprit-Saint ; l’Épouse, c’est Marie, c’est l’Église,
c’est nous : chacun de nous et nous tous ensemble.
Eh
bien ! Frères et sœurs, écoutez bien cette nouvelle : À notre prière,
Jésus est venu chez nous ! Oui, Jésus est présent en Martinique. Plusieurs
fois, vous m’avez montré sa présence et son action. D’ailleurs, qui peut en
douter ! ? Nous sommes si nombreux à prier. Il est là, désormais
élevé comme un étendard sur ce pays. Le problème, c’est que beaucoup ne le
voient pas ; au lieu de tourner les yeux vers le Seigneur, ils baissent le
regard, tout tristes, accablés par le mal et leur péché. Dieu merci, le Jubilé
de la Miséricorde a permis à beaucoup de relever la tête, de regarder vers Lui
et de « resplendir sans ombre ni trouble au visage » (Psaume 33, 6). Mais ce n’est pas fini,
la Miséricorde n’a pas dit son dernier mot.
C’est
pourquoi je déclare dans l’Esprit-Saint que l’objectif principal qui doit
guider désormais chaque baptisé de notre Église est le suivant :
Montrer Jésus
partout, en Martinique et au-delà, personnellement et en Église.
Ce
mot d’ordre est un principe intégral : il touche tout ce que nous sommes.
Désormais, il concerne tous les fidèles baptisés. Guide toutes nos actions.
Conditionne la mise en place de toutes les structures d’Église. Il est la
raison d’être de nos groupes, de nos mouvements, de nos communautés et de nos
ministères. Il façonne notre être et notre agir profonds et fait de nous un
peuple de prophètes (Nombres 11, 29).
Ce n’est pas une option ! C’est sur cet amour missionnaire que nous serons
jugés au soir de notre vie.
En
tant que Pasteur, Serviteur de l’Église du Christ qui est en Martinique, je
demande au Seigneur « de ne pas donner de sommeil à mes yeux » tant
que chaque baptisé ne sera pas devenu un témoin authentique du Christ. Pas
simplement un bon catholique pratiquant, sage… et endormi, mais un fou, un
témoin joyeux, un prophète de la Miséricorde qui Montre Jésus.
Le
projet n’est pas une utopie car il est voulu par Dieu. Envoyé parmi vous, je ne
serais pas fidèle à ma vocation si je n’avais pas pour ce diocèse et chacun
d’entre vous un projet qui ne peut être réalisé que par la grâce de Jésus. Ce
projet prophétique dans l’Esprit est la seule façon de sauver notre pays et ses
enfants du dessein destructeur du diable qui a déjà commencé. Nous en avons la
conviction, c’est le projet de Dieu pour la Martinique. Si telle est la volonté
du Tout-Puissant, ne pas y consentir et y répondre entièrement est un péché
mortel.
Les directives pastorales…
L’Église
Une, Sainte, Catholique et Apostolique est le Corps du Christ et le Temple de
l’Esprit-Saint. Elle est cependant composée à 100% de pécheurs. Cela est
normal. Jésus a voulu que son Église soit un hôpital pour des pécheurs et non
pas un refuge 4 étoiles pour des
saints. À bon droit, des hommes et des femmes reprochent à l’Église des limites
bien réelles. La plupart de ces personnes sont sincères, mais ça ne veut pas
dire que toutes ces critiques sont toujours dans la Vérité.
N’oublions
jamais que, malgré la fragilité des membres (fidèles et pasteurs), l’Église
Catholique est seule à rester fidèle depuis l’origine à tous les principaux
commandements du Seigneur : elle soigne sur toute la planète les pauvres,
les prisonniers, les malades et les ignorants (si elle était une ONG, elle
serait de loin la plus grande du monde) (Matthieu
25, 35) ; elle fait œuvre de Miséricorde et remet les péchés au nom de
Jésus (Matthieu 18, 18) ; elle
marche à la suite de Pierre et ses successeurs (Matthieu 16, 18 ; Jean 21, 17) ; elle maintient le peuple
de Dieu dans l’Unité et la Communion Universelle et ne se répand pas en de
multiples petites communautés indépendantes (Jean 17, 21) ; elle prie sans cesse et non pas quelques heures
par semaine (1 Thessaloniciens 5, 17) ;
elle renouvelle le sacrifice du Corps et du Sang en mémoire de Jésus (Luc 22, 19) ; elle mange le Corps
et boit le Sang du Seigneur pour avoir la Vie éternelle (Jean 6, 54) ; elle prêche dans toutes les langues (Marc 16, 15) ; elle prend Marie
chez elle (Jean 19, 27) et enfin elle
est persécutée : chaque jour (oui, chaque jour !), le sang de ses
martyrs lui donne de suivre son Seigneur dans sa Pâque et de vivre les
Béatitudes (Matthieu 5, 12)…
D’un
autre côté, nous ne pouvons ignorer certaines limites qui causent bien des
souffrances qui la défigurent et entravent sa mission de montrer Jésus. Des
scandales, des incohérences causent même le départ, sinon la perte, de nombreux
frères et sœurs. Un prêtre a fait une grande enquête en Amérique latine qui a
révélé :
1.
que des personnes qui viennent à l’Église ne se sentent pas suffisamment
accueillies et aimées. Certaines parfois même se sentent jugées.
2.
que les fidèles ne reçoivent pas toujours un enseignement de qualité,
c’est-à-dire biblique et doctrinal, capable de changer leur vie. Les pasteurs
et prédicateurs ne leur indiquent pas clairement ce qu’ils doivent croire et ce
qu’ils doivent faire.
3.
que trop peu de catholiques ont fait l’expérience de la rencontre personnelle
de Jésus-Christ (en effet, quand on pense à tant de confirmés, de mariés et
parents des enfants baptisés qui, malgré les promesses, ne viennent plus à l’Église,
ou encore aux contre-témoignages de certains fidèles responsables).
4.
que les baptisés de notre Église ne sont pas assez formés et encouragés à
devenir systématiquement des missionnaires.
Les
gens ne quittent donc pas l’Église du Christ pour des raisons doctrinales (par
exemple parce qu’ils rejetteraient l’Eucharistie, le culte de la Vierge Marie
et des saints ou le ministère du Pape), mais parce qu’ils n’ont pas fait avec
nous, d’abord l’expérience de la communauté, ensuite l’expérience de la foi et
enfin l’expérience d’une vie donnée à Dieu et missionnaire. Sans parler d’un
certain complexe de supériorité, pour ne pas dire de la vanité, qu’on trouve parfois dans notre Église…
Ces
critiques sont fondées, je les fais miennes et j’en déduis trois directives
pastorales qui vont mener de façon pratique notre mission de montrer Jésus.
Désormais notre pastorale devra permettre à tous les fidèles de faire les trois
expériences suivantes, dans l’ordre de priorité :
A-
L’expérience
de la communauté, qui passera par la Famille
La
dimension familiale est fondamentale pour notre vie et pour notre salut. Fondée
par Dieu, la famille est haïe par le démon et par le monde. Les Pères du Synode
sur la Famille ont rappelé, dans un message au monde, que l’Église est une
famille et une famille de familles.
Notre Église n’est pas assez familiale, pas suffisamment fraternelle et pas assez
fondée sur les familles. Toute communauté, en particulier les paroisses,
doivent se considérer comme une famille. Aujourd’hui, nombre de nos paroisses
ressemblent plus à des bureaux de douane, à des administrations du religieux,
qu’à des familles. Il faudra en repenser le fonctionnement. D’un autre côté,
nos familles ne sont pas assez ecclésiales. Si la famille n’est pas une petite Église,
elle se détruit et détruit ses membres. On doit donc y prier, y célébrer le
Seigneur ; les parents doivent être les pasteurs de cette petite Église,
les plus faibles doivent y être soignés et accueillis, les jeunes doivent y
être éduqués dans l’Évangile !
B-
L’expérience
de l’Esprit-Saint, qui se fera par et grâce à l’exercice des ministères
Tous
les agents de la pastorale doivent désormais chercher à exercer leur ministère
dans l’Esprit-Saint et en vue de préparer des cœurs fervents à l’avènement de
ce même Esprit-Saint dans les sacrements. Trop de fidèles (et même des fidèles
engagés) vivent comme les johannites d’Éphèse, ces disciples qui connaissaient
le baptême de Jean mais qui « ne savaient même pas qu’il y avait un
Esprit-Saint » (Actes 19, 2).
Les prédications, le catéchisme et l’éducation des jeunes, la proclamation des
lectures, la préparation aux sacrements, le soin des pauvres, des malades et
des prisonniers, les prières de délivrance, l’animation des funérailles, le
secrétariat paroissial, l’écoute, le chant choral, l’enseignement de la sainte Écriture…
tous les ministères doivent désormais être repensés de façon charismatique en
vue de montrer Jésus et de faire faire l’expérience de l’Esprit-Saint.
C- L’expérience missionnaire, qui doit être au cœur de la
préoccupation de chaque baptisé
En
effet, c’est une lourde responsabilité pour les héritiers du Royaume de Dieu
que de se montrer peu aptes à en faire bénéficier TOUS nos frères, et de
laisser les contre-témoignages de certains d’entre nous éloigner du salut les
plus fragiles de ceux qui sont venus frapper à notre porte. Alors que
l’Esprit-Saint, par le Concile Vatican II, a demandé à l’Église Catholique
d’être le Bon Samaritain de ce monde qui se meurt sur le bord du chemin, de
s’approcher de lui, de le prendre dans ses bras, de le soigner et même de payer
le prix de sa guérison, comment pouvons-nous avoir l’attitude du prêtre et du
lévite qui, pour garder leur pureté, passent leur chemin sans toucher le
moribond (Luc 10, 25-37) ?
Le temps est venu d’une conversion missionnaire de toute la vie de l’Église pour que chaque baptisé, chaque famille, chaque groupe, chaque mouvement, chaque paroisse n’ait d’autre souci que de montrer Jésus au monde qui l’attend. Saint Jean-Paul II disait :
Le temps est venu d’une conversion missionnaire de toute la vie de l’Église pour que chaque baptisé, chaque famille, chaque groupe, chaque mouvement, chaque paroisse n’ait d’autre souci que de montrer Jésus au monde qui l’attend. Saint Jean-Paul II disait :
J’estime que le moment est venu d’engager toutes les
forces ecclésiales dans la nouvelle évangélisation et dans la mission ad
gentes. Aucun de ceux qui croient au Christ, aucune institution de l’Église ne
peut se soustraire à ce devoir suprême : annoncer le Christ à tous les
peuples. Redemptoris Missio, n°3, 1990.
Pawol
la té bien di ! N’est-ce pas ? Alors, qu’as-tu fait de cette
invitation de l’Esprit-Saint ! ?
Le Plan ECCLESIA’M 2020 ! et ses chantiers…
Pour
réaliser cet objectif ambitieux – impossible sans la grâce de Jésus, l’amour de
Dieu le Père et la communion de l’Esprit-Saint et impensable sans la foi,
l’espérance et l’amour – je demande au diocèse de Martinique, à chaque baptisé
personnellement, mais aussi à chaque réalité de ce diocèse, de participer à la
démarche synodale de ECCLESIA’M
2020 !
1)
Cette démarche n’est pas venue d’un vouloir de chair : elle est née dans
l’Esprit-Saint le 12 avril 2015 au Stade de Dillon, lorsque le peuple de
Martinique s’est rassemblé pour célébrer la Pâques, la Miséricorde et
l’ordination d’un nouvel évêque.
2)
Elle s’est poursuivie, au cours du Jubilé de la Miséricorde, par les visites
pastorales des paroisses, des associations, des mouvements, des hôpitaux, des
communautés, des écoles, des familles et les grands rendez-vous jubilaires…
3)
Elle continue aujourd’hui avec cette Lettre Pastorale qui détermine :
. Le mot d’ordre : « Montrer Jésus partout en Martinique et au-delà, personnellement et en Église » ;
. Le mot d’ordre : « Montrer Jésus partout en Martinique et au-delà, personnellement et en Église » ;
. les trois directives pastorales (Faire faire l’expérience de la communauté, de
l’Esprit-Saint et de la mission à chaque baptisé) ;
. et les 5 chantiers missionnaires et pastoraux composés de différents ateliers à mettre en œuvre d’ici
2020 :
. Accompagner et protéger les familles,
. Convertir la pastorale en Mission du Parvis,
. Bâtir une éducation chrétienne,
. Soigner et délivrer les âmes,
. Guérir le monde par l’Évangile.
4)
Cette démarche se poursuivra en 2017 par des assemblées synodales chargées
d’organiser les chantiers et les ateliers, de mettre en place les équipes et
les plans d’action et le calendrier pour les deux années pastorales 2017-2018
et 2018-2019.
5)
En début 2020, viendra le temps des bilans et des conclusions. Une Assemblée
Synodale festive rassemblera, je l’espère, le diocèse pour présenter les
résultats de ce travail communautaire dans l’Esprit-Saint.
Je
confie cette démarche à la Vierge Marie, Mère de l’Église et Notre-Dame de la
Délivrance. À son intercession, je suis persuadé que la Divine Providence a
déjà désigné tous les serviteurs de ces chantiers et mis en place tous les
moyens logistiques et matériels nécessaires. Déjà, à tous, Maman Marie redit :
« Faites tout ce qu’Il vous dira ».
Je
sais aussi que l’ennemi ne manquera pas de mettre des bâtons dans nos roues
(ses « bâtons » favoris étant la division, la jalousie, le
découragement, la peur, la procrastination, la critique…), mais je sais aussi
que, le cas échéant, Elle saura dire à son Fils : « Ils n’ont plus de
vin ».
Alors :
« Même pas peur ! »
OUI,
n’ayons pas peur !
Au
contraire, redisons : « Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je
Vous aime, je… ! »
En
avant pour ECCLESIA’M 2020 !
Montre
Jésus !
À
Rome le 8 septembre 2016
En la fête de la Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie
En la fête de la Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie
+
David Macaire
Archevêque de Saint-Pierre et Fort-de-France
Archevêque de Saint-Pierre et Fort-de-France