Le
Christ est notre paix (Eph. 2,14)
Le 8 juin 2014, la Congrégation du Culte Divin a publié un
document sur le bon déroulement de l'échange de la paix pendant la messe,
document resté plutôt confidentiel. La paix ! Geste hautement symbolique,
car c'est Jésus lui-même qui nous donne d'abord Sa paix : « Je vous
laisse ma paix, je vous donne ma paix » (Jn 14,27), paix qui n'est pas
celle que le monde donne. Cette paix est le fruit de la Rédemption que le
Christ a apporté au monde par sa mort et par sa résurrection. Cette paix est
d'abord la réconciliation entre Dieu et les hommes et ensuite des hommes entre
eux, puisque le Christ nous réunis tous en Lui. Le signe de paix est donc un
très beau symbole de communion entre les fidèles et le Christ. Puisque la paix
vient de l'autel, qui représente le Christ, c'est donc Jésus Christ qui
embrasse ceux qui participent à son sacrifice, en faisant de tous les fidèles
une unité intime qui s'incorpore à Lui. Mais quel sens donnons-nous à ce geste
de serrer la main de son voisin de banc ou de chaise, si nous avons le cœur
rempli de rancœur, de méchanceté, de colère ? Parfois certains s'en
confessent, moi, je leur réponds que la communion n'est pas un calmant, ni un
anxiolytique, ni un antidépresseur doux, bien que dans l'Eucharistie, il y ait
toute la douceur de l'amour de Dieu. Avec de telles dispositions d'âme pendant
la messe, mieux vaut s'abstenir de communier ! « Si tu présentes ton
offrande à l'autel, et que là, tu te souviens que ton frère a quelque chose
contre toi, laisse là ton offrande devant l'autel et va d'abord te réconcilier
avec ton frère, puis reviens, et alors présente ton offrande » (Mt
5,23-24). C'est sans doute la raison pour laquelle le rite de la paix dans le
rite ambrosien (Milan) est opportunément avant l'offertoire, alors que dans la
tradition liturgique romaine, il se situe entre le Notre Père et la fraction du
pain, durant laquelle on supplie l'Agneau de Dieu de nous donner Sa paix, juste
avant la communion. Dans la forme extraordinaire de la messe, le baiser de paix
n'a été conservé que dans la messe solennelle, c'est-à-dire celle avec diacre
et sous-diacre, et seulement les clercs se donnent la paix ! (Ont-ils plus
besoin de faire la paix entre eux que les laïcs ? Il faut le croire !).
Dans ce geste, il y a, certes, une claire dimension ecclésiale, mais il faut
rappeler qu'à la dimension communautaire, est superposée la verticalité :
ce qui nous maintient unis les uns les autres, c'est la présence réelle du
Christ, et non pas, par exemple, se tenir la main au Notre Père, pratique née
chez les protestants. Nous, nous avons l'Eucharistie qui nous unit ! Ce
n'est donc pas une simple paix humaine acquise par l'amitié et solidarité, mais
la paix du Christ ressuscité : c'est Lui notre paix !
Dans la pratique, ce rite est laissé aux soins des
Conférences Épiscopales, car, en raison des caractères, des cultures ou des
différentes sensibilités, les gestes peuvent changer. On ne se donne sans doute
pas la paix de la même manière au Japon et en Afrique... Je sais par expérience
que certains fidèles, plus réservés, n'aiment pas trop cette pratique. Certains
s'en sont plaint auprès des prêtres ; d'autres, un peu hygiénistes,
n'aiment pas serrer la main de ceux qui viennent de tousser ou de se moucher !
Avec les enfants c'est toujours un chahut monstre ! Aux enterrements
certaines familles ne souhaitent pas faire ce geste pour des raisons que je
comprends très bien. Lors des mariages c'est un peu la foire : on risque
de déplacer les plumes des chapeaux, de laisser un peu de fond de teint ou de
rouge aux lèvres sur la joue d’un voisin distrait...
Bon, j’ironise un peu ! Veuillez me pardonner ce ton
quelque peu plaisantin. Voici les recommandations de la Congrégation pour le
Culte Divin :
1. Ne pas introduire un « chant pour la paix »,
qui n'est pas prévu par le Missel Romain.
2. Pour les fidèles, éviter le fait de se déplacer pour
échanger entre eux le signe de paix.
3. Pour le prêtre, éviter le fait de quitter l'autel pour
donner la paix à quelques fidèles.
4. Éviter que le geste de la paix soit l'occasion
d'exprimer des congratulations, des vœux de bonheur ou des condoléances aux
personnes présentes, dans certaines circonstances, comme par exemple, à
l'occasion des solennités de Pâques et de Noël, ou durant la célébration de
rites comme le Baptême, la Première Communion, la Confirmation, le Mariage, les
Ordinations, les Professions religieuses et les Obsèques.
Bien entendu, si une personne paraît isolée, on est porté
tout naturellement à aller vers elle pour lui donner la paix, mais certains ne
souhaitent pas faire ce geste. [...] Gardons toujours à la messe une certaine
sobriété, une attitude d'adoration, de piété et de recueillement surtout à la
consécration et à la communion. Il faut toujours L’adorer en esprit et en
vérité.
Don Carlo Cecchin