mardi 7 février 2012

En chantant... Paul Claudel traduit le psaume 17


PSAUME 1 7
Chant de David
1-2      Je t'aime, Dieu, Yah, force, ma force !
3          Rocher, refuge, libérateur.
Rocher, j'ai dit un rocher pour que je m'y réfugie.
Un rocher, et cette corne là-haut au dessus de la campagne, ce fort toujours prêt à m'ouvrir ses portes pour que j'y trouve un abri.
4          Je n'ai qu'à fermer les yeux, Dieu est là, et tous ces ennemis qui m'entouraient, il n'y a plus personne.
5          De toutes parts autour de moi il y avait la mort et cet ébranlement de moi sous moi pour m'entraîner.
6          L'affreuse démangeaison de l'enfer et ces bras autour de mon cou pour m'étouffer !
7          Et c'est alors qu'il est sorti de moi un cri ! l'antique cri de l'homme vers Dieu à l'heure de sa tribulation.
Du fond de Son sanctuaire il m'a entendu, l'antique cri de l'homme vers Dieu qui L'arrache à Son sanctuaire.
 8         Les lois du monde se sont décollées, la terre tremble au bruit des montagnes qui s'entrechoquent, Tu Te lèves, ô Dieu irrité !
9          La fumée lui sort du nez, le feu Lui sort de la bouche, Ses yeux sont des charbons ardents.
10        Les cieux lui ont fait un escalier pour descendre, la nuit Lui est un matelas sous Ses pieds.
11        Il a enfourché la tempête, les anges Lui servent de monture.
12        L'épaisseur Le cache, la nuée Lui fait un manteau, Il S'avance dans les propagations de la trombe.
13        Le ciel s'est déchiré en morceaux, l'air sous Son haleine fulgure dans les fusillements de la grêle.
14        Il a élevé la voix et le tonnerre lui répond, les parvis pulvérisés du monde s'écroulent dans une précipitation de braise ardente.
15        Il tire, la flèche part, la foudre à coups multipliés fait son œuvre.
16        Mais quelle sont ces eaux qui jaillissent ? les fondements ébranlés de la terre, à quelle source issue n'ont-ils pas donnée ?
À l'accent, Seigneur, de Ta réprimande, à l'expiration de l'esprit de Ta colère !
17        D'en haut il m'a tendu la main et il m'a pris, retiré de ces eaux où j'étais englouti,
18        De toute cette hostilité par-dessus moi qui s'était solidifiée,
19        Cet assaut que je n'attendais pas... Dieu est mon protecteur.
20        Il m'a sauvé, Il m'a élargi, Il me veut.
21        Il S'arrange avec moi de la Justice et de cette pureté qu'Il a découverte à mes mains.
22        J'ai goûté le chemin du Seigneur et le mal pas.
23        Vous pensez, de tels conseils, si on va les rejeter, et Tes commandements, ô mon Dieu, oh que cela est donc bon et que c'est beau !
24        Attention cependant à la faute ! Mais un seul de Tes regards me rend tout blanc.
25        La pureté des pieds à la tête que je Te dois, c'est tout pareil que si c'était la mienne.
26        Tu seras saint avec le saint, innocent avec l'innocent,
27        Élu avec l'élu, pervers avec le perverti.
28        Tu sauveras le peuple humilié que je suis, Tu humilieras la trogne pervicace.
29        Car c'est Toi, Seigneur, tout le feu qu'il y a dans ma lanterne et la lumière qu'elle me fait dans la nuit.
30        La tentation, dans le nom de Dieu je lui échappe et d'un seul bond je lui ai sauté par-dessus.       
31        Dieu est le chemin impollu, Il est l'argent éprouvé, toute l'espérance pour nous qu'il y a à espérer.
32        Qui est Dieu, s'il vous plaît, que le Seigneur ? Et derechef qui est Dieu, s'il vous plaît, que notre Dieu ?
33        Qui m'a ceint de virilité et qui m'a ouvert une route pour que j'y marche pur ?
34        Qui a mis à mes pieds le nerf de la chèvre et de la bête qui aime les hauts lieux.
35        Qui a instruit mes mains à l'escrime et qui a tendu mes bras ainsi qu'un arc de fer.
36        Et qui est pour moi, je n'ai qu'à Le regarder, protection, correction et discipline.
37        La route s'est élargie sous mes pas et mes pieds à chaque enjambée ont pris de l'assurance.
38        Mes ennemis, comptez que je ne les lâcherai pas jusqu'à ce qu'il n'y en ait plus.
39        Jusqu'à ce qu'ils volent en pièces, jusqu'à ce qu'ils tombent en morceaux sous mes pieds.
40-41  Car Tu m'as oint d'un goût pour la guerre, et Tu m'as procuré des ennemis pour que je monte dessus, pour que je marche dessus, pour que je trépigne dessus !
42        Qu'ils gueulent ! Dieu s'est bouché les oreilles pour ne pas entendre !
43        C'est de la boue sous mes pieds pour que je marche dessus, de la poussière au vent pour que je les volatilise !
44        Par-dessus les contradictions de la place publique Tu m'as constitué un chef pour que je le sois.
45        Je n'ai qu'à me faire entendre et les oreilles se dressent.
46        Qu'est-ce pour moi que ce chaos de gens qui mentent et qui radotent et qui boitent ?
47        Avez-vous compris que Dieu, c'est quelqu'un de réel et de vivant, et qu'Il S'est servi de Ses deux mains pour me bénir ?
 48-49 Et qu'Il a fait les peuples pour pas autre chose que m'obéir ? Tous ces ennemis autour de moi pour pas autre chose que j'en triomphe ?
50        C'est pourquoi je réunis toutes les nations entre mes mains comme un psaume pour Te confesser ;
51        Magnifiant Son Christ David et promettant à Son germe au bout de l'avenir de merveilleuses délivrances,
 Ainsi soit-il !
 Paul Claudel, in Psaumes, traductions 1918-1953 (nrf)