mercredi 14 novembre 2012

En assaillant... John et Stasi Eldredge, Une haine particulière

Tous ceux qui me détestent chuchotent ensemble contre moi ;
Contre moi, ils préparent mon malheur.
Psaume 41.8
Ôte cette haine meurtrière, et donne-nous ton propre amour éternel.
Sean O'Casey
L'orage est passé. Et Stasi pleure. Elle avait entouré son jardin de tant d'amour et de soins au fil des ans ! Elle avait passé d'innombrables heures à créer cet espace de beauté remarquable. Elle avait opéré des choix judicieux ; elle avait repiqué des plantes avec soin, mis de l'engrais, paillé à la saison froide, désherbé. Elle avait taillé, arrosé et traité contre les pucerons. Elle avait déplacé certains plants et les avait remplacés, cherchant toujours le meilleur emplacement. Le résultat était féerique. Les gens s'avançaient sur notre allée, s'arrêtaient et contemplaient ; tout était si charmant ! Des roses, de la lavande et des delphiniums, des jets d'eau entourés d'herbe, des marguerites de Shasta. Il y avait davantage de couleurs et de formes que je ne pourrais les décrire. Un lieu de repos et de détente, un refuge loin du monde. Un parfum d'Éden.
Jusqu'à ce soir.
La grêle a commencé à tomber vers six heures. Au début, elle ne semblait pas menaçante. L'été apporte avec lui quelques averses de grêle, dans les Rocheuses ; les grêlons ont la taille de petits pois et l'averse ne dure qu'une dizaine de minutes. Cette fois-ci, les grêlons ont commencé par avoir la taille de billes ; au bout d'un quart d'heure, ils sont devenus gros comme des balles de golf, tombant dru comme lors du déluge du temps de Noé, mais sous forme de glace. Pendant quarante minutes ils n'ont pas cessé de tomber avec violence, arrachant des branches d'arbres, brisant toutes les plantes du jardin ; la tempête laissa derrière elle un paysage de désolation. Lorsque finalement l'orage s'éloigna derrière la montagne, le jardin de Stasi était détruit.
Debout devant la fenêtre, je contemplais l'étendue du désastre, choqué et peiné. L'été est si court dans cette région ; nous ne pouvons admirer les fleurs et la verdure que pendant quelques mois. Cette fois-ci, c'était une véritable attaque. Une attaque en règle contre la beauté. Tout était méconnaissable. En discutant ensemble de cette dévastation, nos pensées à tous deux sont remontées à Ève. L'état de ruine dans lequel se trouvait notre jardin était une métaphore, ô combien valable, pour décrire ce qui s'était passé au couronnement de la création. Chagrin et perte bien plus considérables quand il s'agit de la vie et du cœur d'une femme.
Oui, les femmes ont perdu l'état de grâce originel. Oui, elles ont été blessées. Mais pour bien comprendre les doutes qui se sont insinués dans votre cœur à propos de votre féminité, pour comprendre pourquoi il est si rare de rencontrer une femme vraiment vivante et rayonnante, il faut regarder plus en détail la grande histoire.
Autre assaut
Dans mon adolescence, lors de ce passage qui transforme la fille en femme, j'étais pratiquement coupée de ma famille. Ma sœur aînée avait déménagé en Europe (partie pour « trois mois de vacances », elle y est restée sept ans. Cela vous donne une idée de ce à quoi ressemblait la vie à la maison...) Mon frère était parti, lui aussi, ainsi que mon autre sœur. Il n'y avait plus que moi à la maison ; je terminais mes études secondaires. Mes parents commencèrent alors à m'accorder l'attention après laquelle je soupirais dans ma petite enfance, mais c'était trop peu et trop tard. Mon cœur avait déjà pris ses décisions. J'étais bien cachée. Devant mes parents, je menais la vie d'une « gentille et intelligente étudiante ». Derrière leur dos, ma vie était toute différente.
Je me réfugiais dans l'alcool et la drogue pour atténuer la douleur de mes blessures. Ensuite, comme beaucoup d'autres jeunes femmes auxquelles le père a terriblement manqué ou qui ont été volontairement blessées par lui, je me suis tournée vers les garçons, puis vers les hommes pour satisfaire mon besoin d'amour. Je me persuadais ainsi que j'étais désirée, même si ce n'était que pour une seule nuit.
Je me suis rendue en Europe l'été de ma dernière année universitaire. J'étais conquise par la beauté des monuments anciens, et par la totale liberté dont je jouissais. Mais une jeune femme rebelle et manquant de sagesse, munie d'un Pass de chemin de fer pour voyager partout et d'un cœur qui saigne, attire fatalement l'attention. Lors de ma traversée de l'Italie, j'ai été agressée sexuellement ; bien que furieux contre l'homme, mon cœur me disait toutefois que j'étais encore digne d'être agressée. Je crus que j'étais coupable de cette agression. J'intégrais le mensonge de l'Ennemi de mon âme que j'étais une personne horrible, qui ne méritait que la souffrance. Plus tard, dans le sud de la France, je me mis bien involontairement dans une situation dangereuse. Après avoir bu plus que de raison dans un bar local, mon amie et moi avons accepté d'être ramenées à l'hôtel par les hommes qui avaient bu avec nous. Vous vous secouez certainement la tête en devinant ce qui nous attendait. En fait, les hommes ne nous ramenèrent pas du tout à notre hôtel, mais dans une maison privée où je fus violée.
Après cette agression, je vécus quelque temps dans un état de choc. Je me souviens avoir découvert sur mon corps de nouveaux bleus et de nouvelles égratignures, avec un sentiment d'incrédulité. Je n'étais pourtant pas enragée, tout simplement terrifiée. J'éprouvais certes de l'indignation contre ceux qui m'avaient violée, mais plus encore un sentiment de honte et de dégoût de moi-même. Je voulais être une femme de qualité, une femme vaillante, une femme forte. Or je n'étais rien de tout cela. J'achetai un collier avec un pendentif représentant une femme brandissant le poing. Il me plut énormément. Je le portai fièrement en tant que féministe pour montrer mon indépendance et ma force ; en fait je me cachais dans ma chambre d'hôtel. J'avais très peur des hommes et de ma beauté. Celle-ci constituait pour moi un danger. J'estimais que c'était elle qui avait attiré mes assaillants ; elle était donc à l'origine de ma souffrance indicible et, avec elle, d'une honte incessante, comme beaucoup de femmes le savent.
En reprenant les cours à l'université, je racontai à mon copain ce qui m'était arrivé. Sa réaction ? « Tu l'as probablement cherché ! » Vous pouvez ainsi constater que nous avions une relation malsaine. Il était verbalement abusif et irrité. Il ne me témoigna aucune compassion, et ne me dit aucune parole de consolation. Il n'en voulait même pas à ceux qui m'avaient fait du mal. Sa réaction ne fit que renforcer douloureusement les blessures reçues dans mon enfance. Cache ton cœur. Tu es décevante. Tu es indigne. Personne ne se soucie de toi. Personne ne veut se soucier de toi. Tu es seule.
Si vous écoutez attentivement l'histoire de chaque femme, vous découvrirez un thème commun à toutes. Chacune a connu un assaut contre son cœur. Il peut s'agir d'une agression physique, verbale ou sexuelle. Mais l'assaut est parfois plus subtil : c'est l'indifférence d'un monde qui ne se soucie pas d'elle mais l'exploite jusqu'à épuisement. Quarante années durant lesquelles une femme a été négligée causent aussi des dommages à son cœur. De toute façon, les blessures continuent de se faire sentir longtemps après qu'elle soit devenue adulte, mais toutes délivrent le même message. Tout au long de notre vie, notre question obtient constamment la même réponse, le message se fiche dans notre cœur comme un pieu.
Christiane est la jeune fille dont nous avons parlé plus haut, et que sa mère battait un moyen d'un gros bout de bois. À dix-neuf ans, elle quitta la maison.
J'ai épousé un homme qui voulait être pasteur pour s'occuper de jeunes. Je me disais que je devais absolument épouser cet homme, car j'étais tellement repoussante que je n'aurais jamais l'occasion d'être à nouveau demandée en mariage. Personne ne voudrait de moi. J'étais vierge lors de mon mariage et j'éprouvais beaucoup de bonheur à me donner à mon mari comme don suprême. Le lendemain de notre nuit de noces, je me suis blottie contre mon mari et me suis mise à l'embrasser. Il me repoussa en disant qu'il n'était pas d'humeur à badiner. Pendant toute la semaine qui suivit, nous n'avons plus eu de rapports sexuels. Il ne me toucha pas une seule fois et ne me témoigna pas le moindre intérêt. J'étais anéantie ! Ma question venait d'obtenir la même réponse.
En tant que femmes, nous sommes enclines à nous faire des reproches. C'est la conséquence de nos anciennes blessures. « Il y a quelque chose de foncièrement mauvais en moi ». C'est ce que ressentent beaucoup de femmes (pourquoi faisons-nous tant d'efforts pour nous améliorer ? ou pourquoi nous affairons-nous au point que les cris de notre cœur ne parviennent jamais à la surface ?) Et nous nous sentons très seules. Les deux choses ont un lien. Nous croyons être seules parce que nous ne sommes pas la femme que nous devrions être.
Nous ne nous estimons pas dignes d'être recherchées et fréquentées. C'est comme si nous accrochions une pancarte « Ne pas déranger ! » sur notre personnalité et que nous faisions signe au monde de s'éloigner. Ou alors, nous nous lançons dans la poursuite effrénée d'une promiscuité émotionnelle et physique, en perdant tout respect de nous-mêmes. Nous ne nous croyons pas irremplaçables, c'est pourquoi nous faisons tout pour nous rendre utiles. Nous ne nous croyons pas belles, c'est pourquoi nous nous efforçons d'être belles en apparence, ou alors nous nous laissons aller et nous nous abritons derrière un personnage qui n'a aucune allure. C'est ainsi que nous essayons de plusieurs façons de protéger notre cœur de toute nouvelle souffrance.
Que se passe-t-il réellement ?
Je dormais quand l'attaque contre Disa a été lancée. J'ai été emmenée par les assaillants, tous en uniformes. Ils ont pris des dizaines d'autres filles et nous ont fait marcher pendant trois heures. Le jour, ils nous frappaient et nous disaient : « Vous autres, femmes noires, nous vous exterminerons, vous n'avez pas de dieu ». La nuit, ils nous violaient à multiples reprises. Les Arabes armés nous gardaient ; nous avons été privées de nourriture pendant trois jours.
Femme soudanaise, citée dans le Rapport d'Amnesty International
Au fil des siècles, l'histoire du traitement infligé aux femmes n'est pas reluisante. Elle comprend certes des phases lumineuses, mais dans l'ensemble, les femmes ont été victimes de ce qui semble être une haine particulière depuis qu'elles ont quitté Éden. Le récit que nous avons rapporté n'est qu'un parmi des milliers d'autres qui proviennent non seulement du Soudan, mais de bien d'autres pays ravagés par la guerre. Les agressions sexuelles ne sont que trop fréquentes lors des guerres civiles. Notre but n'est pas de faire un discours politique sur ce sujet, et le temps où Stasi militait pour le mouvement féministe est bien éloigné. Ceci mis à part, que faites-vous de l'avilissement, des abus, des assauts dont les femmes du monde entier ont souffert, et souffrent encore de nos jours ?
Il y a encore soixante-dix ans environ, aux petites filles qui naissaient en Chine et qui n'étaient pas abandonnées sur le bord des routes pour y mourir (les gens préféraient les garçons) on bandait les pieds de façon très serrée pour qu'ils ne se développent pas normalement. Avoir des petits pieds était un signe de féminité et était apprécié des futurs maris. Mais ces femmes étaient du coup rendues infirmes, peut-être une autre raison pour laquelle les hommes estimaient cette pratique bonne. Les femmes qui avaient eu leurs pieds bandés dans leur enfance, boitaient toute leur vie et étaient incapables de marcher facilement ou vite. Même si la pratique fut déclarée illégale dans les années 1930, elle s'est pratiquée encore longtemps après.
Vous savez que pendant les millénaires d'histoire juive rapportée dans l'Ancien Testament, la femme juive était considérée comme la propriété de son mari et n'avait aucun droit légal (comme c'était et c'est encore le cas dans d'autres cultures). Elles n'avaient pas le droit d'étudier la Loi juive, ni d'instruire leurs enfants. Elles avaient un secteur assigné dans la synagogue. Il n'était pas rare qu'un juif dise, dans sa prière matinale : « Ô Dieu, je te loue de ce que tu ne m'as pas fait païen, femme ou esclave ».
Selon un proverbe chinois, « la femme devrait être comme de l'eau ; elle ne devrait prendre aucune forme et ne pas avoir de voix ». Un proverbe indien dit : « Instruire une femme, c'est comme arroser le jardin de son voisin », ce qui signifie que c'est à la fois une folie et une perte de temps. Dans l'hindouisme, la femme a moins de valeur qu'une vache. Dans l'islam, la femme a besoin que trois hommes vérifient ses dires au tribunal pour valider son témoignage. Autrement dit, sa parole, sa valeur correspondent au tiers de celles d'un homme.
Mais le sort de la femme ne se limite pas au déni d'instruction et de droits légaux. La clitorectomie est l'ablation du clitoris. Cette mutilation génitale féminine, une coutume douloureuse et horrible, se pratique encore de nos jours sur des fillettes âgées de cinq ans. Répandue surtout en Afrique, cette intervention chirurgicale est souvent réalisée dans la nature au moyen d'une pierre tranchante. Les infections sont fréquentes. Parfois la fillette meurt. La femme qui a subi cette opération est infirme à vie et ne peut jouir du rapport sexuel. C'est d'ailleurs le but visé. Les hommes estiment qu'une femme consciente de sa sexualité est dangereuse. Il faut donc assujettir sa féminité.
La violence sexuelle contre les femmes sévit dans le monde entier. Elle sévit aussi contre les petites filles. Plus d'un million de filles sont livrées au commerce sexuel chaque année. Pourquoi cet assaut systématique, parfois brutal, presque universel contre la féminité ? D'où vient-il ? Ne faites pas l'erreur de penser que « l'ennemi, c'est l'homme ». Les hommes ont certes une responsabilité dans cette situation, et ils auront un jour à en rendre compte devant le Créateur. Mais vous ne comprendrez pas cette histoire, la vôtre, tant que vous ne discernerez pas les forces qui tirent les ficelles et que vous ne saisirez pas leurs motivations.
D'où vient cette haine contre les femmes, visible dans le monde entier ? Pourquoi est-elle si diabolique ?
Une haine spéciale
En effet, ce n'est pas contre le sang et la chair que nous luttons, mais contre les principats, contre les autorités, contre les pouvoirs de ce monde de ténèbres, contre les puissances spirituelles mauvaises qui sont dans les lieux célestes.
Éphésiens 6.12
On ne peut comprendre l'assaut contre la féminité, sa longue histoire, son extrême perversité, si on ne sait rien des forces spirituelles du mal contre lesquelles les Écritures nous mettent en garde. Au risque de me répéter j'insiste sur le fait que cela ne dédouane pas les hommes (ni les femmes, car elles aussi s'en prennent aux femmes) et ne supprime pas leur responsabilité. Mais il faut savoir que cette explication des assauts contre Ève et ses filles ne suffit pas, tant que nous ne prenons pas en compte celui que la Bible nomme le prince des ténèbres et sa haine particulière de la féminité.
Revenons aux événements qui se sont déroulés dans le jardin d'Éden. Qui le diable a-t-il choisi de poursuivre ? Sur qui Satan a-t-il décidé de jeter son dévolu dans son attaque contre la race humaine ? Il aurait pu s'en prendre à Adam... mais il ne l'a pas fait. Satan s'est adressé à Ève. Il a choisi Ève. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi ? On peut penser que, comme tout prédateur, il s'est jeté sur celle qu'il estimait être le plus faible des deux. C'est certainement vrai, car Satan est sans pitié. Mais nous croyons qu'il y a plus. Pourquoi Satan fait-il d'Ève sa cible dans son attaque contre l'humanité ?
La Bible explique que Satan s'appelait autrefois Lucifer, « celui qui porte la lumière », le Fils du matin. Cela donne à penser qu'il possédait une gloire, un éclat, une splendeur uniques. Il avait alors été nommé chef des anges. Certains pensent qu'il était le chef des armées angéliques de Dieu. Il était le gardien de la gloire du Seigneur.
Tu mettais le sceau à la perfection,
tu étais plein de sagesse, parfait en beauté. 
Tu étais en Éden, le jardin de Dieu ;
tu étais couvert de toutes sortes de pierres précieuses,
de sardoine, de topaze, de diamant, de chrysolithe, d'onyx, de jaspe,
de lapis-lazuli, d'escarboucle, d'émeraude et d'or ;
tes tambourins et tes flûtes étaient à ton service,
préparés pour le jour où tu fus créé.
Tu étais un keroub protecteur, aux ailes déployées ;
je t'avais placé dans la montagne sacrée de Dieu ;
tu étais là, tu te promenais au milieu des pierres ardentes 1.
Il était parfait en beauté. C'est là que se trouve la clé. Lucifer était magnifique, d'une beauté à couper le souffle. Mais ce fut aussi sa ruine. L'orgueil est entré dans son cœur. L'ange vint à penser qu'il était brimé, sous-estimé. Il voulait détourner à son profit l'adoration adressée à Dieu. Il ne voulait pas simplement jouer un rôle noble dans l'Histoire, il souhaitait que l'Histoire s'articule autour de lui. Il voulait en être la vedette. Il voulait focaliser l'attention sur lui, être adoré. « Miroir, miroir, dis-moi si je suis la plus belle... »
Ton cœur s'est enhardi à cause de ta beauté,
tu as perverti ta sagesse par ta splendeur ;
je te jette à terre,
je te livre en spectacle aux rois 2.
Satan est tombé à cause de sa beauté. Il a donc cherché à se venger sur la beauté. Il la détruit partout où il le peut dans le monde de la nature. Mines à ciel ouvert, naufrages de pétroliers, incendies, Tchernobyl. Il s'acharne à détruire la gloire de Dieu sur la terre, comme un psychopathe qui détruirait de grands chefs-d'œuvre.
Mais surtout, il hait Ève.
Parce qu'elle est captivante, particulièrement glorieuse et qu'il ne l'est plus. Elle est l'incarnation de la beauté de Dieu. Plus que toute autre chose dans la création, elle incarne la gloire de Dieu. Elle attire le monde à Dieu. Satan la hait avec une jalousie à peine imaginable.
Il y a cependant encore davantage. Le Malin déteste Ève parce qu'elle donne la vie. C'est la femme qui donne naissance, pas l'homme. C'est elle qui nourrit le nouveau-né. Elle nourrit également la vie de l'âme, des relations, de la spiritualité, dans tout ce qu'elle touche. Satan est meurtrier dès le commencement 3. Il apporte la mort. Son royaume est celui de la mort. Sacrifices rituels d'enfants, génocide, holocauste, avortement, telles sont ses idées inspirées aux hommes. Ève représente donc sa plus grande menace humaine, puisqu'elle transmet la vie. Elle la préserve et la communique. Le nom « Ève » signifie « vie » ou « génératrice de vie ». « L'homme appela sa femme du nom d'Ève ("Vivante"), car elle est devenue la mère de tous les vivants »4 nous dit la Genèse.
Rapprochez ces deux faits : d'une part Ève incarne la beauté de Dieu, d'autre part elle donne la vie au monde. Le cœur rancunier de Satan ne peut le supporter. C'est pourquoi il lance contre elle des assauts d'une haine rare. L'histoire humaine dissipe tout doute à cet égard. Commencez-vous à comprendre ?
Pensez aux grands récits. Dans presque tous, le méchant s'en prend à la bien-aimée du héros. Il s'en prend à la Belle. Magua en veut à Cora dans Le dernier des Mohicans. Longshanks en veut à Murron dans Braveheart. Commode en veut à la femme de Maximus dans Gladiator. La sorcière en veut à la Belle au bois dormant. Les filles de la belle-mère en veulent à Cendrillon. Satan en veut à Ève.
Cela explique pas mal de choses. Ce n'est pas détaillé ici pour vous effrayer. Au contraire cette lumière peut éclairer l'histoire de votre vie, à condition de la laisser entrer. La plupart d'entre vous pensaient que les mésaventures étaient de leur faute, qu'elles les méritaient. Si vous aviez été plus jolies, ou plus intelligentes, ou si vous aviez fait davantage pour plaire aux hommes intervenus dans votre vie, ces choses horribles vous auraient été épargnées. Vous auriez été aimées. Ils ne vous auraient pas fait de mal.
Et beaucoup se sentent coupables de ne pas être recherchées aujourd'hui, de ne pas jouer un rôle essentiel dans une grande aventure, de ne pas avoir de beauté à dévoiler. Vos blessures vous communiquent presque toujours le même message : « Tu es fautive. Tu mérites ce qui t'arrive ». Les choses changent du tout au tout lorsque vous comprenez que ces mésaventures vous sont arrivées parce que vous êtes glorieuses. Parce que vous constituez une menace majeure pour le royaume des ténèbres. Parce que vous reflétez d'une manière unique la gloire de Dieu dans le monde.
Vous êtes haïes à cause de votre beauté et de votre pouvoir.
Sur un plan humain
Moi, John, j'ai une confession à faire : je ne voulais pas être le coauteur de ce livre.
J'estimais certes qu'il devait être écrit. Il fallait qu'il le soit. Mais je ne voulais pas être celui qui s'en charge. Je savais que cela m'obligerait à entrer dans l'univers des femmes, en particulier dans celui de ma femme, d'une manière beaucoup plus approfondie que la vie quotidienne l'exigeait de ma part. Pour rendre tant soit peu justice à un livre sur les femmes, il fallait que j'aille au fond des choses, que j'écoute plus attentivement, que j'étudie et sonde le mystère de l'âme féminine. Quelque chose en moi s'y opposait. Cette répulsion avait tout l'air d'une réaction allergique. Reculer. Me tenir à l'écart.
J'étais pleinement conscient de ce qui se passait au-dedans de moi, et je me sentais comme un imbécile. Mais j'en savais aussi assez sur mon compte personnel et sur la bataille à livrer pour le cœur féminin pour devoir explorer cette ambivalence. Quelle était cette raison en moi — et chez la plupart des hommes — qui m'empêchait de vouloir pénétrer dans l'univers d'une femme ? C'est trop. Trop difficile. Trop de travail. Les hommes sont beaucoup plus simples. Plus faciles. N'est-ce pas justement le message qui vous colle à la peau toute votre vie de femme ? « Tu es trop et pas assez à la fois. Tu ne mérites pas cet effort de ma part » (et pourquoi est-ce un tel effort ? C'est qu'il doit y avoir quelque chose de faussé en toi !)
Cette répugnance fondamentale de l'homme à sonder l'univers de la femme tient en partie à la crainte la plus profonde de l'homme : l'échec. Bien sûr, il peut plaisanter à propos « des différences entre les hommes et les femmes », entre Mars et Vénus. Mais en vérité, il a peur. Il craint qu'après avoir sondé l'univers de sa femme, il ne soit pas en mesure de l'aider. C'est son péché. C'est sa lâcheté. Le plus souvent, à cause de la honte que sa femme éprouve, l'homme se tient à distance. La plupart des mariages (et des longues fiançailles) aboutissent à cet accord tacite : « Je ne m'approcherai pas davantage. Je suis allé aussi loin que j'étais disposé à le faire. Je ne te quitterai pas, et cela devrait suffire pour te rendre heureuse ». Il existe donc cette sorte d'entente cordiale à vivre aussi proches l'un de l'autre, mais pas plus.
C'est pour cela que la plupart des femmes se sentent seules. C'est en partie le résultat de l'égoïsme des hommes. Le Seigneur sait que les hommes sont égoïstes et égocentriques ! Quand Ève fut attaquée la première fois, Adam ne fit rien pour la secourir... Les hommes pèchent par violence et par passivité. C'est aussi simple, évident... et laid que cela !
Il y a cependant encore autre chose. Quelque chose de plus diabolique. Il y a quelque mois, nous avons eu une réunion incroyable qui fut — du moins pour moi — révélatrice de ce mystère.
Stasi et moi étions rassemblés avec les hommes et les femmes qui travaillent avec nous et qui animent des retraites pour hommes et pour femmes. L'équipe masculine voulut proposer ses conseils, ses recommandations et offrir ses prières à l'équipe féminine en vue de l'organisation de leur prochain camp-retraite. C'était une chance pour les femmes, toutes vraiment admirables, de nous ouvrir leur cœur et de nous dire ce qu'elles ressentaient.
Notre réunion s'orienta rapidement des questions extérieures — la durée des sessions et les problèmes logistiques — à l'univers interne de l'équipe féminine. En commençant à aborder les thèmes plus intimes, quelque chose m'a frappé. Ce n'était qu'une impression, mais elle était inexplicable et forte.
Recule !
C'est le sentiment que j'éprouvais. Personne n'avait prononcé ce mot. Rien de ce qui se disait ou se faisait l'impliquait. Ce n'était pas une voix dans ma tête. Tout simplement une impression irrépressible. Je n'étais pas sûr de son origine, mais ce fort sentiment de « résistance », cette intuition que nous ne devions pas nous aventurer plus loin dans cette direction, ce besoin plutôt de reculer prenait de plus en plus de vigueur en moi et s'imposait à moi de plus en plus fort, au fur et à mesure que nous pénétrions dans la vie de ces femmes. À chaque pas qui nous rapprochait de leur cœur, j'éprouvais le besoin accru de mettre fin à la discussion, de nous retirer, de nous désengager. Devant ce qui se déroulait en moi, je sus que c'était très important.
En tant qu'homme, je savais que ce n'était pas le vrai désir de mon cœur à l'égard de ces femmes. Je les aime ; je désire me battre pour elles. Je l'ai fait plusieurs fois. Je savais également que cela ne pouvait pas non plus être le désir de leur cœur. Elles sollicitaient notre engagement. J'interrompis donc le cours de la conversation en leur posant une question qui pouvait leur sembler hors de propos : « Vous sentez-vous seules pour organiser vos retraites ? » Silence. Puis des larmes, des larmes montant des profondeurs de chacune d'elles. Toutes dirent en chœur : « Oui, nous nous sentons seules ». Je savais que ce sentiment ne concernait pas seulement l'organisation des retraites. « Éprouvez-vous également ce sentiment dans votre vie de femme, tout simplement ? » « Oui, absolument, je me sens seule la plupart du temps ».
Il faut cependant savoir que chacune de ces femmes cultive des relations profondes et intéressantes. Si elles se sentaient seules, alors que dire des autres femmes ? Et si nous, après tant d'années de luttes en leur faveur, entendons intérieurement ce puissant message de retrait, que doivent alors éprouver les autres hommes ? Je parie qu'ils ne l'ont pas identifié ou ne lui ont pas donné de nom, mais je suis sûr et certain qu'ils le ressentent et qu'ils se sont tout simplement dit que c'était ce qu'eux-mêmes ou leurs femmes, ou les deux souhaitaient.
Éloigne-toi, ou laisse-la seule ou au fond, tu ne souhaites pas vraiment l'accompagner, elle exige trop de toi, telle est la manière dont Satan dresse l'homme contre toute femme dès le jour de sa naissance. Cela équivaut, sur les plans émotionnel et spirituel, à abandonner à la mort la petite fille sur le bord de la route. L'Ennemi lui murmure : « tu es seule » ou « dès que les gens se rendront compte de qui tu es véritablement, ils te laisseront tomber ou personne ne viendra te défendre ».
Marquez une pause. Calmez l'angoisse de votre cœur et demandez-vous : « Est-ce un message que j'ai entendu, auquel j'ai cru, que j'ai craint et avec lequel j'ai grandi ? » Non seulement la plupart des femmes vivent dans la crainte d'être finalement abandonnées par les hommes avec qui elles sont, mais elles craignent également d'être lâchées par les autres femmes. D'être délaissées par leurs amies. Il est temps de dénoncer cette menace insidieuse, cette peur paralysante, ce terrible mensonge.
Il me vient à l'esprit une scène du film Les deux tours, le deuxième de la trilogie Le Seigneur des anneaux. Elle se déroule au pays de Rohan, dans le vestibule du roi, dans la chambre de la charmante Eowyn. Elle est la nièce du roi, la seule Dame de la cour. Théodret, son plus cher cousin et fils du roi, vient juste de mourir des blessures reçues au cours de la bataille. Elle pleure sa mort lorsque Wormtongue, un soi-disant conseiller du roi mais en réalité un traître, une créature vile, se glisse dans le cabinet de la jeune fille et se met à répandre son poison dans le cœur de la jeune fille sans protection.
Wormtongue : Oh, il a dû mourir au beau milieu de la nuit. Quelle tragédie pour le roi de perdre son fils unique et seul héritier. Je comprends que son trépas soit difficile à accepter, d'autant plus maintenant que votre frère vous a abandonnée. [Wormtongue s'était arrangé pour le faire bannir].
Eowyn : Laissez-moi seule, serpent !
Wormtongue : Mais vous êtes seule ! Qui sait ce que vous avez dit aux ténèbres, dans les moments les plus amers de la nuit où toute votre vie semble se rétrécir, les murs de votre boudoir se refermant sur vous, un clapier pour entraver un être sauvage ? (Il pose sa main sur son visage). Si belle, si froide, comme un pâle matin de printemps qui frissonne encore d'un hiver tenace.
Eowyn (s'arrachant finalement à son emprise) : Vos paroles sont du poison !
« Mais tu es seule ! » Voilà ce que murmure le diable à l'oreille des femmes, en ricanant. Il joue sur la pire crainte de la femme : l'abandon. Il fait tout pour qu'elle soit abandonnée, ensuite il fait durer chaque événement pour le faire paraître comme un abandon.
Il y a de l'espoir
Je ne veux pas dire que les hommes n'ont aucune responsabilité dans cette affaire. Dieu sait que nous avons beaucoup de choses dont nous devons nous repentir. Je dis simplement que vous ne comprendrez pas l'assaut prolongé et soutenu contre la féminité, tant que vous ne le verrez pas inscrit dans un complot plus vaste, de la force la plus vile que le monde ait jamais connue. L'Ennemi voue une haine particulière à Ève. Si vous acceptez de croire que le diable tient un quelconque rôle dans l'histoire de ce monde, vous ne pouvez manquer de remarquer sa haine contre la féminité.
Le Malin porte une responsabilité dans tout ce qui vous est arrivé. S'il ne livre pas forcément l'assaut directement lui-même — le péché humain a largement de quoi se manifester à cet égard — il veille cependant à ce que le message de vos blessures parvienne à votre cœur. C'est lui qui vous talonne avec le sentiment de honte, de manque d'assurance en vous-même et d'auto-accusation. C'est lui qui met sur votre route de mauvais consolateurs pour vous asservir davantage. Il fait tout pour empêcher votre restauration. C'est ce qu'il craint le plus : il redoute qui vous êtes, ce que vous êtes, ce que vous pouvez devenir. Il a peur de votre beauté et de votre cœur qui donne la vie.
Écoutez la voix de votre Roi. Ces versets prononcés pour Israël reflètent également l'amour de Dieu pour ses enfants :
À cause de Sion je ne me tairai pas,
à cause de Jérusalem, je ne me tiendrai pas tranquille
jusqu'à ce que sa justice s'impose, comme une clarté,
et son salut, comme un flambeau qui s'allume.

Alors les nations verront ta justice
et tous les rois ta gloire ;
et on t'appellera d'un nom nouveau
que la bouche du Seigneur désignera.
Tu seras une couronne de splendeur
dans la main du Seigneur,
un turban royal
dans la paume de ton Dieu.
On ne te dira plus « Délaissée »,
on ne dira plus ta terre « Dévastation » ;
mais on t'appellera « Mon plaisir est en elle »,
et on appellera ta terre « L'Épousée » ;
car le Seigneur prend plaisir en toi,
et ta terre sera épousée.
Comme un jeune homme épouse une jeune fille,
ainsi tes fils t'épouseront ;
et comme la mariée fait la gaieté du marié,
ainsi tu feras la gaieté de ton Dieu
.5
C'est pourquoi tous ceux qui te dévorent seront dévorés ;
 tous tes adversaires, tous, iront en captivité ;
ceux qui te saccagent seront saccagés,
et je livrerai au pillage tous ceux qui te pillent.
Car je te rétablirai,
je te guérirai de tes plaies — déclaration du Seigneur.
Puisqu'ils t'appellent « Bannie » —

c'est Sion — « Celle que personne ne cherche
 »6
Vous ne comprendrez pas votre vie en tant que femme, si vous ne saisissez pas la double affirmation suivante : vous êtes passionnément aimée par le Dieu de l'univers ; vous êtes passionnément haïe par son Ennemi.
Il est donc temps de parler de votre rétablissement. Dieu est plus grand que votre Ennemi. Il vous cherche depuis l'origine du temps. Il est venu pour guérir votre cœur brisé et rétablir votre âme féminine. Tournons-nous maintenant vers lui.
John et Stasi Eldredge, in Cœur de femme (farel)

1. Ézéchiel 28.12-14
2. Ézéchiel 28.17
3. Jean 8.44
4. Genèse 3.20
5. Ésaïe 62.1-5
6. Jérémie 30.16-17